Le Journal de Saône et Loire
24 septembre 2019

Bernard Kudlak : « La fin de Plume fait aussi partie de la vie »

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Après presque 40 ans de spectacles, le cirque Plume a décidé de tout arrêter après sa Dernière Saison. Cette dernière tournée de 150 dates passe par Chalon. Une fin d’activité en pleine gloire alors que les salles sont pleines. Bernard Kudlak, co-fondateur de Plume, s’explique.

Pourquoi arrêter alors que tout va bien pour le cirque Plume ?
« Arrêter ce n’est ni joyeux, ni triste, c’est juste la vie. Mais l’arrêt de Plume, ce n’est pas pour tout de suite, nous avons encore 150 dates devant nous et une grande exposition sur Plume et l’histoire du cirque aux Salines Royales d’Arc-et-Senans. »

Que représente le cirque pour vous ?
« C’est avant tout dépasser sa condition humaine, le cirque, c’est le temps d’avant la chute, c’est la maîtrise du déséquilibre. C’est aussi montrer que tout est possible. Un spectacle de cirque est une invitation à la joie et à la peur également. Le cirque est un art vivant, fait par des vivants pour des vivants. Quant à la question d’arrêter alors qu’on nous attend, que les salles sont pleines, c’est simple : on a commencé une histoire, elle s’est bien passée et on décide d’arrêter comme on a commencé sans intervention extérieure. On sait depuis six ou sept ans que la Dernière Saison marquera la fin de Plume. »

Vous auriez pu transmettre ce cirque à d’autres ?
« Nous en sommes pas dans un schéma de cirque traditionnel, reproductible. Et puis, il y a plus de 150 compagnies de cirque en France, on est dans une société où tout le monde s’accroche. Nous, on dit place aux jeunes et justement, on fait de la place. Nous n’arrêtons pas pour un problème économique mais parce que la vie est composée de différents temps, la vie est précieuse dans son instant. Notre société veut être jeune éternellement, elle a du mal à regarder l’arrêt des choses. »

« Il faut être narcissique dans ce métier, mais pas égoïste. » Bernard Kudlak, co-fondateur de Plume

Que sera votre avenir ?
« Il y aura une grande exposition à Arc-et-Senans. Et puis, je suis un artiste, j’aime écrire, peindre énormément, sculpter. »

Pourquoi avoir donné le nom de Plume à votre cirque, pour le côté insaisissable ?
« Tout cela est arrivé alors que j’étais au volant de mon Tub Citroën 3 vitesses. Nous cherchions un nom pour notre compagnie de rue, les noms les plus farfelus se côtoyaient. J’arrive et je propose le nom de Plume. Tout le monde dit bof mais le nom reste dans la liste. On a procédé par élimination et à la fin ne restait plus que lui. Plume, c’est la légèreté, la plume des oiseaux, des anges, des écrivains. »

Quels souvenirs garderez-vous de cette aventure ?
« Pas un plus qu’un autre : les rencontres, les amis dans toute l’Europe, la joie du public et ces moments de partage qui nourrissent la paix de l’âme. »

Vous avez toujours tenu à rester à Besançon, pourquoi ?
« Il y a 40 ans, ce n’était pas la règle, mais on n’a pas voulu se mettre dans le show-business, pour rester dans notre campagne en dehors des tournées et avoir une vie simple. On n’a pas voulu changer avec le succès. »

Propos recueillis par Meriem SOUISSI

La Dernière Saison, point final d’une aventure spectaculaire

Difficile de se dire que l’on ne verra plus le cirque Plume, ni à Chalon, ni ailleurs. Mais cette Dernière Saison, nom de leur ultime spectacle, laissera dans les esprits et les yeux de belles images, une douce dinguerie et une gentille poésie.
Ce spectacle s’amuse des saisons et se moque gentiment des artistes qui vieillissent. Concours de brioches, percussions sur abdos Kronenbourg et popotins rebondis. Ces messieurs ne sont pas toujours à leur avantage tandis que les femmes y sont jeunes et souples. Cette Dernière Saison est une fable poétique et écologique et, si l’on jongle avec les plumes, les sacs plastiques recouvrent bientôt le sol, annonciateur de terribles drames. On se dit que peut-être le cirque Plume préfère arrêter pour ne pas voir la terre et la mer irrémédiablement polluées. Comme s’il préférait arrêter à temps pour ne garder que des bons souvenirs partagés avec des spectateurs enthousiastes devant 1h50 de belles images et de joie communicative. C’était finalement bien court 1h50 pour dire au revoir et merci.

Meriem Souissi