Artistik Rézo
28 septembre 2018

Cirque Plume, "La dernière saison" : Un parfum d’été indien

Cirque Plume, "La dernière saison" : Un parfum d'été indien | Artistik Rézo (presse_lds) {PDF}

Acrobates, comédiens burlesques, danseurs, chanteurs et musiciens : Du beau temps sur tout le parcours ! Le Cirque Plume présente son ultime spectacle, dans la splendeur d’un vrai bouquet final. On savait ô combien la signature « Plume » est ravissante, et ici, les musiques de Benoit Schick font de « La dernière saison » un régal complet.

Quand on tire sa révérence, on a intérêt à laisser de beaux souvenirs. En annonçant son « ultime spectacle » et sa « dernière saison », le Cirque Plume prend donc des risques. Mais il les assume avec brio. « La dernière saison » risque fort de se transformer en été indien par une tournée déjà bouclée jusqu’à fin octobre 2019. Et à La Villette les places disponibles se font rares, alors que le spectacle s’y joue jusqu’au 30 décembre.

Depuis la création de Cirque Plume au début des années 1980, Bernard Kudlak, son directeur artistique, a toujours défendu la note poétique de spectacles pleins d’humanité, d’humour et de douceur. Avec « La dernière saison », il clôt un chapitre majeur de l’art sous chapiteau. Et c’est bien avec son propre chapiteau que la troupe s’est installée à La Villette, chapiteau-théâtre où l’on voit le spectacle en frontal, comme dans un théâtre, tout en se régalant de l’ambiance circassienne.

Un hommage à l’homme en tant qu’animal

« La dernière saison » rend hommage… aux saisons. Mais aussi aux âges de l’Evolution, au lien entre les hommes et la nature, aux animaux et aux querelles, au Père Noël et tant d’autres. On y croise une contorsionniste loufoque, une acrobate rebelle, un carnaval alémanique, une toile de fond d’inspiration japonaise, des parapluies lumineux et surtout ce Monsieur Loyal qui se transforme en gorille, en lion, en éléphant. Inénarrable, Cyril Casmèze, très singulier « acrobate zoomorphe » prête même son ventre pour servir de calebasse.

Tous les interprètes de cette « dernière saison » sont exceptionnels, dans leur maîtrise du corps, bien sûr, mais aussi en tant que personnages, burlesques ou poétiques, animaliers à la façon d’un La Fontaine ou d’un lutteur burlesque. S’ils ne se transforment pas en instruments à musique ambulants, comme s’ils sortaient tout droit d’un dessin surréel de Roland Topor. On les voit se chamailler ou parader en procession, ce qui donne à cette fresque burlesque un air de rite païen et de mystère. La fabrique à images tourne à plein régime…

Un concert circassien

Le rythme des changements est soutenu, entre ambiances shakespeariennes – et donc à la fois poétiques et vives – qui alternent avec des querelles burlesques. Et qui dit rythme, dit musique. « La dernière saison » se distingue aussi par la finesse des compositions et la qualité bouleversante des chanteurs. Ambiances rock ou africaines, chanson, jazz ou folk, chaque registre reçoit ici une attention toute particulière, alors que la musique est souvent le parent pauvre d’un spectacle de cirque. Pas ici ! Ce spectacle est autant un véritable régal pour les mélomanes parmi nous.

Il sera d’autant plus difficile de dire adieu au Cirque Plume. Et si certains artistes ont déjà annoncé, à plusieurs reprises, leur « dernier spectacle », on peut croire Kudlak sur parole. Sa maîtrise et la qualité absolue de son travail suggèrent aussi qu’il ne prononce pas le mot « dernière » ou « ultime » à la légère. Cirque Plume nous manquera. Mais cette disparition annoncée fait aussi partie de la beauté de son parcours, et est un acte artistique en soi, la cerise sur un gâteau sous chapiteau. Nous en avons goûté pendant plus de trois décennies. Voici donc une dernière part qui reste à déguster. Avec délice…

Thomas Hahn

Composition, musique : Benoit Schick
Costumes : Nadia Genez
Lumières : Fabrice Crouzet
Son : Jean-François Monnier