La Croix
2 octobre 2009

Plume, le cirque des poètes

Avec leur nouvelle création, Bernard Kudlak et sa troupe invitent à une rencontre idyllique entre les arts du cirque et les maîtres de la peinture

Plume, le cirque des poètes | La Croix (presse_adp) {JPEG}II est des rendez-vous qu’on ne manque pas. Le Cirque Plume en est un. Le rythme de ses créations est tranquille : une tous les deux ou trois ans. Depuis sa fondation en 1984 par Bernard et Pierre Kudlak, deux frères bisontins flanqués de comparses toujours à leurs côtés, comme Robert Miny et Brigitte Sepaser, les maîtres de la musique.
Pionnier du "nouveau cirque", "sans animaux, ni strass, ni paillettes", Plume s’est imposé comme un cirque de poètes. L’atelier du peintre s’inscrit dans ce droit fil. Prenant prétexte d’une visite au musée, Bernard Kudlak et sa bande invitent à un délicieux voyage au pays de la peinture où les tableaux prennent vie au rythme de la musique, des acrobaties, du jonglage. À la mise en abîme des Ménines de Vélasquez, à l’échappée belle des odalisques d’Ingres surgies de leur toile, aux haltes références à Klein, Soulages, Picasso… répondent des jeux de piste enchantés. Kristina Dniprenko, un rien crâne dans son habit rouge, virevolte dans sa roue allemande avec une virtuosité à donner le tournis. Là, Tibo Tout Court jongle avec cinq balles, donnant le tempo d’une musique endiablée. Laura Smith, toute menue dans sa robe à volants, s’élance et rebondit sur un trampoline blanc, métamorphosé en lit de pétales rouges. Peu avant, elle jouait les amoureuses suspendues dans l’air dans un langoureux numéro de main à main porté par une statue vivante, Mark Piéklo.
Comme Chelsea O’Brian (sensuelle odalisque) et Kristina Dniprenko, Laura Smith vient de Montréal. Le cirque français connaîtrait-il une telle crise pour qu’il vienne recruter ses artistes sur le Nouveau continent ? Bernard Kudlak s’explique : " Ce n’est pas le talent des circassiens français qui est en cause, mais leur formation. L’École nationale supérieure de Châlons-en-Champagne ne les prépare pas à devenir des interprètes, comme le sont les comédiens, les musiciens, les danseurs. Moralité, ils se veulent tous "auteurs", créant leurs propres spectacles à la tête de leur propre compagnie. Aucun n’est capable (*) de s’intégrer dans une troupe."
Seule réserve : l’abus des intermèdes clownesques qui alourdit le rythme. Le spectacle présent pour deux mois à la Villette, en est à ses premières représentations. Bernard Kudlak a le temps de resserrer les boulons…

Didier Méreuze


(*) Droit de réponse de Bernard Kudlak :
Je ne me reconnais pas dans les propos que me prête Didier Méreuze, affirmant qu’" aucun élève de l’Ecole Nationale Supérieure de Châlons-en-Champagne n’est capable de s’intégrer dans une troupe ". Je n’ai parlé que de la politique revendiquée par l’Ecole Nationale Supérieure des Arts du Cirque de Châlons-en-Champagne. D’ailleurs, il est important de signaler que Tibo Tout Court est issu du Centre des Arts du Cirque Le Lido de Toulouse et Antoine Nicaud de l’Ecole du cirque Fratellini. Au cirque, depuis toujours, les artistes viennent de toutes les nations.